André Breton (le nôtre, le Sherbrookois, pas l’autre)
Moi, le country, ben, ça me touche. Ça vient me chercher dans le fin fond de mon cerveau reptilien. Sauf que l’année où je travaillais dans le Vieux-Montréal, du temps où j’étais un jeune designer trendy, il y a de cela à peine 25 ans, cette chanson me gossait au plus haut point. Chaque matin de ma putain de vie, un gars la chantait sur le quai du métro McGill. IMMANQUABLEMENT. Comme une litanie qui ponctuait ma job «de jour» et qui m’emmerdait royalement. Même franchir le portique Art Nouveau de Guimard n’arrivait pas à me consoler. Me connaissant, c’est tout dire.
Encore une fois, comme moi (eh oui), comme vous souvent, d’ailleurs, j’avais tout faux. Cette chanson, je la détestais. Je la recevais comme une ode à l’abnégation. Une ode au ptit pain quotidien, tel un hymne national de merde des Québécois. Catholique de surcroit. OMG (…). Pas pour moi. Non merci.
Aujourd’hui, c’est différent. Oui et non, en fait. Je ne suis pas plus croyant faut croire. Mais j’ai comme un peu compris que le quotidien, ben, euh, c’est lui qui est garant du futur. Du mien. Du vôtre. Je suis lent, que voulez-vous. C’est une idée qui a cheminé 25 ans dans ma caboche, tout ça grâce à une chanson western collée au plafond de ma calotte crânienne. C’est une idée qui, aujourd’hui, a pris toute la place dans ma foutue tête de cochon.
Qu’un jour à la fois, on peut changer.
Qu’un jour à la fois, on peut changer le monde.
Qu’un jour à la fois, on peut changer notre monde.
N’en déplaise à certains. Ici ou ailleurs.
On peut TOUT changer. En commençant par soi-même. En étant optimiste (on n’a pas vraiment le choix, sinon on est foutu comme disait Hubert Reeves dans le prologue de la Belle Histoire). En étant un maillon fort de l’engrenage. En faisant sa part. En prenant sa place dans l’histoire. Oui, oui, l’histoire avec un petit h. La plus importante au fond. Celle que les petits-enfants de nos enfants raconteront au jour. Avec passion. Avec fierté si l’on n’est pas trop con. Ou plutôt si l’on arrête de l’être.
– Juste ici, entre l’écriture de ces deux paragraphes, un fou furieux a foncé dans une foule à Nice, tuant 84 personnes, dont au moins 10 enfants –
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On peut tout changer.
On doit tout changer.
On doit tous changer.
La vie, c’est un grand privilège. Un grand cadeau. Une grande responsabilité. C’est vrai qu’on peut regarder le train passer et apprécier sa chance. Ou encore pleurnicher sur elle. Demander à l’autre de faire quelque chose. C’est vrai que tu peux aussi cracher sur l’autre (sur celui ou celle qui tente de faire quelque chose) sans offrir de solutions, seul sur ton quai de petites misères. C’est plus facile.
Bravo. Good Show.
Et si l’on sautait tous dans ce foutu train? Avec ce qu’on a. Avec ce qu’on sait faire. Oui, y’en a en première classe. Je sais. C’est pas une raison de rester sur place. Moi, j’aime mieux m’y agripper. Y’a plus d’air entre les deux wagons.
Un jour à la fois, avec chacun, chacune ses forces, ses faiblesses surtout, tenté de faire une différence. Chaque jour comme une occasion de bien faire. Mieux faire. Commencer dans sa propre cour, c’est ben correct. À la maison, au boulot beaucoup, peu importe. Vous avez, je vous le jure, de l’ascendance sur les décisions. Il y a toujours, à chaque situation donnée, moyen de faire de bons choix. De meilleurs choix. Ou du moins, les influer. Il n’y a jamais de bonnes excuses pour ne rien faire, ne rien dire. JAMAIS.
Un jour à la fois, faire de meilleurs choix… C’est quoi, un meilleur choix? Ça, c’est vraiment une question pas facile. Une mautadine de bonne question en fait. Souvent, la réponse passe soit par le bien-être de la collectivité, soit par l’idée d’un certain humanisme ou encore par la curiosité envers l’autre, par la connaissance de l’autre. L’amour de l’autre n’est jamais une mauvaise donnée dans cette équation. Aussi, par l’équilibre entre nous et la nature, comme dit si bien David Suzuki. À vous de prioriser. Pas à moi.
Un jour à la fois, oui, ça peut commencer aussi simplement que par des billets dans Facebook. Ou une image dans les réseaux sociaux. Aussi futile que cela puisse paraître, c’est l’éveil ici qui compte. La prise de conscience. Merci Facebook & Cie (c’est moi qui affirme ça?). Il n’y a pas d’échelle de valeurs qui compte quand il est question d’engagement social. Le Monde a besoin du monde. Ça presse.
Un jour à la fois, oui aussi, ça peut-être par un achat. Chaque fois que vous mangez bio, le ruisseau derrière chez moi brille un peu moins dans le noir. Alors, lâchez-moi patience avec le même goût, les mêmes valeurs nutritives. Ça c’est du spin, du PR de l’industrie agroalimentaire. Venez donc boire un verre d’eau de ravins dans les champs dans mon coin. On jasera après, si vous tenez encore sur vos deux pieds.
Un jour à la fois, Avec des millions de gens, avec des millions de gestes. Nous devons croire en nous dès maintenant. Pour demain.
Changer le monde? Oui, un jour à la fois. Inlassablement. Immanquablement.
Comme une litanie.
Publié dans Infopresse le 19 juillet 2016.