Tout pareil. Même combat. Tout est publicité. Si vous êtes de ceux qui croient que vous en avez bientôt fini avec la publicité grâce, entre autres, à l’avènement des réseaux sociaux et à l’âge d’or de la conversation et des communautés en ligne, vous êtes encore en train de vous faire baiser, tout comme dans la chanson de notre ami Dutronc. La publicité est là pour rester. En fait, elle se nourrit de vos bons sentiments et de mes photos de chats. La collection et la dissection de vos données, du data ainsi que la science des algorithmes (les mêmes qui envahissent subtilement votre plateforme chérie de partage de photos) ne sont pas vraiment là pour vous aider à sauver le monde. Nos conversations, c’est le Klondike des publicitaires de demain. En fait, si Orwell avait su, il en aurait probablement pondu l’une de ses meilleures dystopies.
Pas trop jojo, hein?
Aujourd’hui, ce qui me fait sourire le plus, c’est le snobisme des jeunes acteurs des nouveaux médias et des réseaux sociaux face à l’ancienne garde publicitaire. Tout en ridiculisant celle-ci et ce qu’elle fait, a fait, ils ne se doutent même pas que ce qu’ils construisent a encore beaucoup plus de puissance de tir «publicitaire» que n’importe quelle campagne de pub dite traditionnelle. Ils en sont les acteurs, les futurs pères, les futures mères.
Oh! Faites-lui confiance, la «pub» a le malin plaisir de se réinventer, de se transformer au gré des révolutions technologiques. De l’affiche dessinée à la main à la presse de Gutenberg. Des premières imprimantes rotatives à la radio. De la télévision aux réseaux sociaux en passant par la naissance d’internet et la mobilité. À chaque révolution, elle devient de plus en plus puissante, de plus en plus intimement liée à notre mode de vie. Ses possibilités sont toujours plus immenses, fascinantes.
Pour un adepte de la pub, de la mise en marché, tout ça est enivrant. Tous les cadrans sont dorénavant remis à zéro. La beauté de tout ça, c’est que nous pouvons faire ce que nous voulons de cette révolution. Je disais pas jojo plus haut. Eh bien oui, pas jojo si on laisse faire. Mais si l’on en décidait autrement? Si, tous ensemble, on poussait dans le bon sens? Vers une façon disons, plus humaine de faire les choses?
Là, je vais prendre la balle au bond, lancé par mon ami Patrick Beauduin dans son premier ouvrage, Le long parcours d’une grande gueule. Dans ce livre magnifique, il parle entre autres de sa quête de cohérence. Cette cohérence qui nous fait défaut si lourdement toute notre vie. Il parle de cette difficile séparation qui peut parfois sembler inconciliable entre nos aspirations profondes, définies par nos valeurs personnelles et intimes, et notre vie professionnelle. Patrick raconte humblement comment il a fait face à cette longue et parfois douloureuse entreprise de réconciliation.
Et si l’on appliquait cette grande et magnifique idée (on aime ça, les grandes idées, en pub) à ce qu’on fait? Mieux, à ce qu’on s’apprête à réinventer? Pourrions-nous enfin réconcilier les valeurs en mutation profonde de notre société nouvelle et la réinvention du monde publicitaire de demain? Pour trouver enfin une cohérenceentre les actions que nous proposons à nos clients, à leurs clients (tout en utilisant les nouveaux joujoux à notre portée) et les valeurs qui nous sont les plus chères? Pour ça, il faut naturellement être moins naïf et comprendre que la solution n’est pas de regarder passer le grand cirque. Il faut le réinventer, ce foutu cirque. Cette fois, pour vrai. Faire foutrement mieux que jamais.
Il faudra jeter beaucoup aux poubelles. Tout casser. Et ne pas se gêner. Écouter les voix divergentes aussi. Pour réaliser une renaissance, il ne suffit pas d’opiner de la tête. Il faut trimer dur. Laisser aller le confort des idées reçues. Revenir aux sources parfois. Pour mieux aller vers l’avant. L’avenir. Le nôtre.
Revenir aux sources pour aller vers demain, c’est revenir vers soi peut-être. Comme nous dit si bien Patrick dans son bouquin. Cessons les artifices et les coups d’esbroufe. Soyons honnêtes, à l’écoute. Bienveillants. Empathiques surtout. Toujours soucieux de l’autre. Mandat par mandat, possibilité par possibilité, nous pouvons réaliser une différence. Je le crois sincèrement. Je suis pas mal certain qu’une bonne grosse surdose d’humanisme ne nous serait pas fatale, mais plutôt bel et bien salvatrice.
Cessons d’être petits dans nos gros egos. Osons la cohérence en toute chose. En pub et ailleurs aussi. Notre monde s’en portera beaucoup mieux. Car n’oubliez jamais…
Tout est publicité.
P.-S.: Avez-vous remarqué que je vous raconte souvent la même histoire? Toujours un peu différemment? C’est la bonne vieille technique du marketing direct. La répétition. Mine de rien, ça finit toujours par rentrer dans la caboche. C’est le but avoué.
Publié dans Infopresse le 31 mars 2016.